Annexes

Extrait du white paper Bitcoin (Satoshi Nakamoto, 2008)

Traduit de l’anglais. Source: https://bitcoin.fr/bitcoin-explique-par-son-inventeur/

Texte original: https://bitcoin.org/bitcoin.pdf

Résumé. Un système de monnaie électronique entièrement en pair-à-pair permettrait d’effectuer des paiements en ligne directement d’un tiers à un autre sans passer par une institution financière. Les signatures numériques offrent une telle solution, mais perdent leur intérêt dès lors qu’un tiers de confiance est requis pour empêcher le double paiement. Nous proposons une solution au problème du double paiement en utilisant un réseau pair-à-pair. Le réseau horodate les transactions à l’aide d’une fonction de hachage qui les traduit en une chaîne continue de preuves de travail (des empreintes), formant un enregistrement qui ne peut être modifié sans ré-effectuer la preuve de travail. La plus longue chaîne (d’empreintes) sert non seulement de preuve du déroulement des évènements constatés, mais également de preuve qu’elle provient du plus grand regroupement de puissance de calcul. Aussi longtemps que la majorité de la puissance de calcul (CPU) est contrôlée par des noeuds qui ne coopèrent pas pour attaquer le réseau, ils généreront la plus longue chaîne et surpasseront les attaquants. Le réseau en lui-même ne requiert qu’une structure réduite. Les messages sont diffusés au mieux, et les noeuds peuvent quitter ou rejoindre le réseau à leur gré, en acceptant à leur retour la chaîne de preuve de travail la plus longue comme preuve de ce qui s’est déroulé pendant leur absence.

Introduction

Le commerce sur Internet dépend aujourd’hui presque exclusivement d’institutions financières qui servent de tiers de confiance pour traiter les paiements électroniques. Bien que ce système fonctionne plutôt bien pour la plupart des transactions, il écope toujours des faiblesses inhérentes à son modèle basé sur la confiance. Les transactions totalement irréversibles n’y sont pas vraiment possibles, puisque les institutions financières doivent gérer la médiation de conflits. Le coût de cette médiation augmente les coûts des transactions, limitant en pratique la taille minimale d’une transaction et empêchant la possibilité d’avoir des petites transactions peu coûteuses. L’impossibilité d’avoir des paiements non réversibles pour des services non réversibles engendre un coût encore plus important. Avec la possibilité d’inverser les transactions, le besoin de confiance augmente. Les marchands doivent se méfier de leurs clients, en les harcelant pour obtenir plus d’informations que nécessaire. Une certaine part de fraudes est acceptée comme inévitable. Tous ces coûts et incertitudes de paiement peuvent être évités par l’utilisation d’une monnaie physique, mais aucun mécanisme n’existe pour réaliser des paiements à travers un système de communication sans avoir recours à un tiers de confiance.

Ce dont nous avons besoin, c’est d’un système de paiement électronique basé sur des preuves cryptographiques au lieu d’un modèle basé sur la confiance, qui permettrait à deux parties qui le souhaitent de réaliser des transactions directement entre elles sans avoir recours à un tiers de confiance. Les transactions qui sont informatiquement impossibles à annuler protégeraient les vendeurs de fraudes éventuelles, et un système de compte séquestre pourrait facilement être implémenté pour protéger les acheteurs. Dans ce document, nous proposons une solution au problème de double-dépense en utilisant un serveur horodaté distribué en pair-à-pair pour générer des preuves informatiques de l’ordre chronologique des transactions. Le système est sécurisé tant que des noeuds honnêtes contrôlent ensemble plus de puissance de calcul qu’un groupe de noeuds qui coopéreraient pour réaliser une attaque.

Les erreurs de l’approche keynésienne

Extrait de : SALIN, Pascal, “ Que peut-on demander à la politique monétaire ”, Fondation Politique, mai 2014

Source: http://www.fondapol.org/wp-content/uploads/2014/05/056-SALIN-2014-07-09-web-Que-peut-on-demander-%C3%A0-la-politique-mon%C3%A9taire.pdf

« La théorie keynésienne considère que, dans certaines circonstances « normales », la politique monétaire peut avoir un effet positif sur l’activité économique. En effet, pour les raisons indiquées ci-dessus, une expansion monétaire implique une baisse du taux d’intérêt, ce qui stimulerait l’investissement. Dans une perspective keynésienne, cette augmentation de l’investissement est désirable, non pas parce qu’elle permettrait d’accroître la capacité productive, et donc ultérieurement la production, mais tout simplement parce qu’elle est censée accroître la demande globale, et donc la production. Nous aurons par la suite l’occasion de discuter cette proposition, mais restons pour le moment dans le cadre de la théorie keynésienne. Celle-ci se focalise, non pas sur cette situation « normale », mais sur une situation particulière qui est censée expliquer un équilibre de sous-emploi pour lequel, au demeurant, la politique monétaire perd sa capacité à stimuler l’investissement et la demande globale.

Sous le prétexte de développer une théorie macroéconomique générale, et plus particulièrement pour expliquer le chômage, Keynes a choisi un ensemble d’hypothèses très spécifiques qui, en les combinant, sont censées expliquer le chômage, et donc aider à la définition des politiques économiques à mettre en oeuvre pour retrouver le plein-emploi. Le point de départ de la démonstration consiste à supposer que, pour une raison inexpliquée, il y a soudain une chute de l’investissement et donc un excès d’épargne. Une telle situation n’a pas de cause endogène, c’est-à-dire qu’elle ne résulte pas du fonctionnement normal du système économique ou même d’un choc extérieur, elle est tout simplement le résultat des « esprits animaux » des entrepreneurs qui deviennent tout d’un coup sceptiques à l’égard des développements économiques futurs, et préfèrent ne pas investir. Pour les économistes classiques, dans un tel cas, le taux d’intérêt devrait diminuer, ce qui ouvrirait de nouvelles opportunités d’investissement et réduirait l’épargne, de telle sorte qu’il y aurait un retour à l’équilibre sur le marché des fonds prêtables. Mais, a n de poursuivre son propre but intellectuel, Keynes se doit d’inventer quelques mécanismes susceptibles d’empêcher que ce processus d’ajustement puisse se produire. Il y arrive en faisant deux hypothèses ad hoc, à savoir l’existence d’une trappe à liquidités, et l’inélasticité de l’investissement au taux d’intérêt.

Il n’est pas nécessaire, dans le cadre de la présente étude, d’insister sur ces deux hypothèses. Mais il est tout de même remarquable que ces deux hypothèses – qui sont le coeur de la théorie keynésienne puisqu’elles permettent de définir un équilibre de sous-emploi – soient totalement arbitraires et contraires aux fondements mêmes de toute analyse économique sérieuse. En effet, l’une et l’autre supposent implicitement que les agents économiques ne sont pas rationnels, soit parce que les investisseurs ne seraient pas sensibles aux signaux de taux d’intérêt, soit parce que les individus conserveraient des encaisses inutiles au lieu de les utiliser. On peut donc s’interroger sur ce paradoxe extraordinaire par lequel l’une des théories économiques les plus célèbres, la théorie keynésienne, est en fait l’une des théories les plus arbitraires et les moins réalistes. Elle doit probablement sa célébrité au fait qu’elle apporte aux gouvernements un alibi incomparable pour pratiquer des déficits budgétaires: grâce à Keynes, ils peuvent toujours prétendre agir ainsi pour permettre la « relance économique ». Mais il serait temps d’oublier la théorie keynésienne et de refuser d’appeler « politique de relance » une politique de déficit budgétaire. De manière plus générale, il est erroné de penser que l’activité économique puisse être stimulée par une augmentation de la demande globale obtenue soit par la politique budgétaire, soit par la politique monétaire (soit par les deux, comme tant de pays ont malheureusement essayé de le faire récemment pour sortir d’une crise qui n’avait strictement rien de keynésien) ”.

La théorie autrichienne des cycles économiques

Extrait d’un entretien entre Cécile Philippe, directrice de l’Institut Economique Molinari, et Grégoire Canlorbe (03/12/03).

Source: https://www.institutcoppet.org/2014/12/03/entretien-avec-cecile-philippe-par-gregoire-canlorbe

« A l’inverse de Keynes, les économistes de l’école d’économie autrichienne voient dans les manipulations monétaires la cause des cycles économiques. Loin d’être inhérent à nos systèmes dits capitalistes, ils sont la conséquence d’un trop grand laxisme dans la création de monnaie.

Selon eux, un excès de monnaie – créé en multipliant les crédits offerts – va financer des projets d’investissement qui ne pourront pas tous être terminés, faute de ressources réelles. Au fur et à mesure que les acteurs vont s’en rendre compte, ils vont dans un premier temps chercher par tous les moyens des ressources pour finir leurs projets. Faute de les trouver, ils devront mettre la clé sous la porte. Ils se verront donc dans l’incapacité de rembourser les emprunts qui leur ont permis de se lancer dans ces aventures, menaçant ainsi la solvabilité des banques qui leur ont fait ces prêts.

La faillite d’un entrepreneur n’est pas un drame majeur pour la collectivité dans son ensemble. Elle peut être gérée assez facilement, en accompagnant l’entrepreneur concerné, ses salariés et ses créanciers.

En revanche, le problème est dû au fait qu’il arrive qu’un très grand nombre d’entrepreneurs fassent faillite au même moment. Il n’est plus question de la faillite d’un seul entrepreneur, mais d’un grand nombre d’entre eux qui font ensemble des malinvestissements. L’ampleur des erreurs ainsi commises rend impossible un atterrissage en douceur.

Le problème vient de ce que la création monétaire, qui s’exprime à travers une politique généreuse de crédit, suscite de véritable “ cycles d’erreurs ” Elle trompe de nombreux acteurs, en leur permettant de se lancer dans des projets qui se révéleront impossibles à terminer et qui seront donc générateurs de pertes.

Car ces nouveaux crédits émis de façon excessive trouveront acquéreur à des taux d’intérêt artificiellement bas. Or les taux d’intérêt sont une référence pour évaluer la profitabilité d’un projet. Lorsqu’on les manipule, on brouille la vision de l’entrepreneur et sa capacité à anticiper correctement ses profits et ses pertes potentiels. Le calcul économique, dont nous avons vu qu’il était nécessaire à un développement rationnel et durable, s’en trouve faussé.

Sur un marché libre, les taux d’intérêt résultent de la préférence temporelle des individus pour le présent. Vous comme moi préférons bénéficier immédiatement des services d’un bien plutôt que de devoir en profiter plus tard. Il est ainsi préférable d’avoir 100 euros aujourd’hui plutôt que demain. Pour se séparer de l’usage de ces 100 euros aujourd’hui, il faut espérer en avoir non pas 100 demain mais, par exemple, 105. Dans un tel cas, le taux d’intérêt est de 5 %. Ce taux reflète la préférence pour le présent. Plus ce taux est élevé, plus la préférence pour le présent est forte, et plus il est faible, plus la préférence pour le présent est réduite.

Les taux d’intérêt sont donc normalement des prix supposés refléter la quantité d’épargne que les individus sont prêts à mettre à la disposition d’investisseurs, leur permettant ainsi de mener à bien leurs projets. Quand on manipule à la baisse ces taux, on laisse penser qu’il existe un stock d’épargne plus important et surtout que la volonté de consommer est moindre que ce qu’elle n’est en réalité. Ce point est fondamental pour comprendre que tous les projets lancés sur la base de taux d’intérêt faussés ne pourront pas tous être menés à bien.

En effet, la pression à la baisse des taux d’intérêt va inciter des entrepreneurs à se lancer dans des projets de durée de plus en plus longue, puisque les taux en vigueur indiquent – au moins sur le papier – qu’il est maintenant rentable de les lancer. Or, des projets de plus longue durée, c’est-à-dire plus capitalistiques, nécessitent une immobilisation plus longue de nombreuses ressources, dont il va falloir s’assurer la disponibilité pendant tout le processus de production.

Or, c’est justement là que les choses s’enveniment. En effet, puisque la préférence pour le présent des individus n’a pas changé, aucune ressource réelle n’a été libérée des processus de production visant la consommation immédiate où la demande reste inchangée.

Par conséquent, pour obtenir les ressources en travail, matières premières, etc., indispensables à la réalisation de ces projets plus capitalistiques, il va devenir nécessaire d’enchérir sur le prix des biens en question, ce qui alimente des bulles sur les marchés concernés. Ce faisant, la marge de profitabilité des projets va diminuer par rapport aux projets qui satisfont plus rapidement les besoins des consommateurs.

Ce renchérissement du prix des matières premières va aussi susciter des besoins de liquidités supplémentaires auprès des banques. Si celles-ci sentent leur solvabilité menacée, elles peuvent décider de ne plus octroyer de nouveaux crédits provoquant ainsi la faillite des entrepreneurs en question. C’est d’autant plus probable que le renchérissement des prix peut être à l’origine de tensions à la hausse du niveau général des prix, incitant les banques centrales à remonter leurs taux directeurs rendant le refinancement des banques commerciales plus difficile.

C’est alors que la bulle éclate avec fracas et entraîne l’arrêt de nombre de projets, la faillite en cascade d’entreprises et l’augmentation du taux de chômage. Ces phénomènes sont la preuve que de nombreux malinvestissements ont été produits. Ils montrent aussi que des ajustements au sein de la structure de production sont nécessaires.

La spécificité de l’école d’économie autrichienne est ainsi de montrer les effets de la création monétaire sur la structure de production, à savoir qu’elle est augmentée de façon artificielle et insoutenable et doit être diminuée pour se réadapter aux préférences des consommateurs.

Enfin, la crise des subprimes me semble être le parfait exemple du cycle économique et j’y consacre d’ailleurs un chapitre dans mon dernier livre. Plus encore, on ne peut vraiment pas accuser cette crise d’être le symbole d’un capitalisme débridé quand on analyse les faits d’un peu plus près. Car que constate-t-on à ce sujet ? Qu’elle est le pur produit de l’interventionnisme, et ce,

  • dans le domaine monétaire, avec une politique monétaire accommodante de la part de la Fed, la monnaie rappelons-le restant un bien public,
  • dans le domaine bancaire, le Community reinvestment act visant à favoriser les crédits auprès des minorités défavorisées,
  • et enfin dans le domaine foncier, l’explosion des prix s’étant concentrée là où dès les années 70, les politiques dites de « développement intelligent » ont limité l’usage du foncier. Le tout s’est accompagné d’un marché immobilier « distordu » où des entités que je qualifierais de faussement privées comme Fannie Mae et Freddie Mac ont permis et facilité l’accumulation de crédits de qualité de plus en plus faible.

Dans un tel contexte, ceux qui ont accusé les fameuses déréglementations bancaires – qui ont effectivement permis aux quelques 9 000 banques américaines de se développer sur l’ensemble du territoire plutôt que de rester confiner à des activités dans leur État de création – ne voient que la toute petite partie émergée de l’iceberg.

Bien loin de la vision, trop souvent répandue, d’un marché américain qui aurait pâti d’une déréglementation à outrance, l’histoire montre au contraire que les subprimes sont une coproduction des pouvoirs publics et d’acteurs privés chargés d’exécuter leurs souhaits ».

Réalisation & conception : Gwenaël Bony
Février 2018